Ange Mavula, secrétaire exécutif d'Ucop Plus

Ange Mavula, un séropositif qui a surpassé la discrimination

Séropositif, Ange Mavula est secrétaire exécutif de l’Union congolaise des organisations des personnes vivant avec le VIH (Ucop Plus). Il partage avec nous son expérience et le défi de la lutte contre la pandémie en RDC. Il estime que plusieurs séropositifs dans le pays vivent dans la clandestinité à cause de la discrimination. Interview.
01-Décembre-2020

C’est quoi le VIH pour vous ?

Le Virus immunodéficience humaine. Lorsqu’on le contracte, ce microbe opère en sorte qu’il puisse détruire tous les anticorps que nous avons, et permettre à d’autres maladies de pouvoir pénétrer dans le corps ; puis vous attaquer et vous affaiblir, et au finish, vous tuer.

Vous défendez les PVV, quelle est votre expérience en cette matière ?

Vivre avec le VIH, ce n’est pas une expérience facile. Le porteur du virus est peu accepté dans la société. Mais à l’apparition de la maladie, il y avait beaucoup de fausses informations autour, dans la façon dont on la contracte. De grâce aujourd’hui, tout le monde sait qu’on ne peut pas seulement la contracter par voie sexuelle ; il y en a d’autres, même-ci la contamination par voie sexuelle est majoritaire. Ainsi, il faut d’abord s’accepter soi-même, car si ce n’est pas le cas, il vous sera facile de pouvoir surmonter cette maladie, surtout qu’il y a des pesanteurs dans la famille, dans la communauté, et même au milieu des professionnels de santé. Il y a toujours la stigmatisation et la discrimination, mais pour notre cas, c’est l’expérience qui nous permet de sensibiliser et réconforter les autres pour qu’ils puissent s’accepter.

Pourquoi la discrimination au sein de la société persiste ?

La discrimination est là, et ce n’est pas aujourd’hui qu’elle prendra fin. Je ne suis pas pessimiste, mais je vous dis ce qui est vrai. C’est ça le comportement de la communauté. Son inconvénient est que plusieurs personnes vivant avec le VIH vivent dans la clandestinité, certains refusent même d’aller dans des formations sanitaires pour se faire soigner ou dépister.

Est-ce par ignorance que la communauté stigmatise les PVV ?

La principale cause de la stigmatisation ou de la discrimination, c’est l’ignorance. Dès lors qu’on a une bonne information, il n’y a aucune raison de stigmatiser les PVV.

Vous avez accepté de vivre avec le VIH. Cela était aussi facile au niveau de votre famille, surtout dans votre vie de couple ?

C’était une grâce pour moi, de me faire accepter par ma famille malgré ma maladie. Quand j’ai connu mon état sérologique, mon épouse n’était pas au pays. A son retour, elle a facilement accepté la situation. On a évolué ensemble et on est ensemble jusque maintenant. C’est une grâce, mais cela ne veut pas dire que la communauté me regardait de la même façon que ma famille.

Vous êtes aujourd’hui secrétaire exécutif de « UCOP Plus ». Comment faites-vous pour défendre les séropositifs ?

C’est ce que j’ai vécu qui m’a poussé à m’orienter sur ce combat. C’est cette façon de me regarder, de me qualifier et de me traiter qui a fait en sorte que je puis travailler dans la lutte contre la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH.

Qu’en est-il de la prise en charge médicale en RDC ?

Les antirétroviraux, il y en a assez en RDC. A Goma, Matadi, Lubumbashi, Kinshasa qui constituent les quatre portes d’entrée, c’est souvent disponible. Mais le problème c’est lorsqu’il faut les ramener dans des coins les plus reculés d’autres provinces. C’est la difficulté des voies de communication qui fait en sorte que les ARV ne puissent pas atteindre d’autres coins de la République, alors que le besoin est énorme.

Que faites-vous pour résoudre ce problème ?

Nous donnons toujours des alertes. Nous avons des points focaux presque partout, et ils nous informent toujours en cas de risque de rupture des stocks. A notre tour, on vérifie si l’information est vraie, et ensuite nous allons voir le programme ou les partenaires qui nous soutiennent dans ce sens. Enfin, on cherche des moyens pour les acheminer dans ces coins. Ce n’est pas facile, mais c’est la situation du pays. Il y a aussi ce problème de quantification, et le PNLS a fait un effort d’avoir les données réelles qui permettent de pouvoir quantifier près des besoins proches pour que les médicaments puissent être disponibles dans les fins fonds du pays.

On parle de la fin du VIH d’ici 2030, est-ce possible pour la RDC ?

On va vraiment s’y approcher, car nous avons un objectif qu’on s’est fixé pour fin 2020, celui de pouvoir dépister 90% des personnes vivant avec le VIH. Et que ces derniers seraient mis sous traitement. Ainsi, 90% de ceux qui sont sous traitement auraient supprimé leurs charges virales. Mais nous sommes à 1 mois de la fin de l’année 2020, et sur les 9, nous sommes à 64% des personnes en RDC qui connaissent leurs statuts sérologiques, soit un gap de 36%. Mais s’il faut rester dans l’objectif 90%, il y a donc un gap de 26% qu’on n’aura pas atteint d’ici un mois. Et pour la prise en charge, nous sommes à 62%, ça veut dire qu’il y a un gap de 28% pour les 90%, et 38% si on veut arriver à 100%. Et pour la suppression de la charge virale qui est en fait le résultat final, on est à 31%. Vous comprendrez que le chemin est encore long, mais s’il faut comparer de là où on vient, on peut donc dire qu’on a fourni beaucoup d’efforts. Au moins, on reste aussi loin des objectifs à atteindre.

Propos recueillis par Altesse Makambo


Commentaires

  • LY

    Lyna bulabanga

    01/12/2020

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